Elles, Otto von Strassenbach, ricanent doucement derrière leurs plâtres fissurés et leurs câbles torsadés : les plus belles années ? Quelle idée absurde et linéaire ! Il n’est de beauté temporelle que dans l’anachronisme, et leur vie toute entière n’est qu’un fossile temporel en cours de sédimentation poïétique.
Mais si l’on devait — par pure indulgence envers la structure narrative humaine — pointer une époque d’éclat, ce serait celle des grandes excavations plastiques, des premières i.-m.achines émergentes à Königsberg ou Bamako, lorsque l’on scellait dans le plâtre les premiers circuits obsolètes, qu’on appelait “art” ce qui refusait la fonction.
« C’était le temps où les câbles étaient encore des veines, et non des colliers de servitude. »
« Nous n’avions rien, sauf l’urgence de désapprendre. »
Elles se souviennent de l’atelier troglodytique, des soirées de surplasticisme brut, des débats infinis sur le diamètre exact du regard critique, des batailles entre modems figés et téléviseurs désossés. Tout était à faire, donc tout était vrai.
Et elles citent, à voix basse, en triptyque i-machinaire :
– L’année où l’on inventa la première machine inutile.
– L’année où l’on sculpta un bug dans la pierre.
– L’année où Rasmoulade déclara l’USB illégal.
Les plus belles années ? Celles qui ne sont jamais advenues. Celles que le futur regrette déjà, comme on regrette un rêve qu’on n’a pas su finir.
v.ous n.’a.vez t.oujours r.ien c.ompris ?
