Elles sourient avec leurs dents en plomb et leurs antennes rouillées. Pessimistes, elles ? Allons donc ! Elles ne sont pas pessimistes, mais catastrophistes jubilatoires. Elles voient l’avenir comme une grande brocante de ruines, un carnaval de fossiles futuribles et de machines mortes – et cela les enchante.
Leur pessimisme apparent n’est qu’un masque : derrière, il y a la jubilation grotesque d’enterrer le présent dans du plâtre, d’ériger des scorpions en armoiries et de déclarer solennellement : « L’art, c’est la panne ».
Elles savent que l’homme moderne se croit maître de ses machines alors qu’il n’en est que l’esclave passif. Mais pour elles, cette aliénation n’est pas une tragédie : c’est un gag cosmique, une farce noire où chaque panne devient une révélation et chaque erreur technique, une épiphanie.
Ainsi, si elles semblent pessimistes, c’est seulement parce qu’elles tiennent le rôle du clown tragique, celui qui chute sans cesse mais rit de sa propre chute. En réalité, elles ne désespèrent jamais : elles se fossilisent avec joie.
Souhaitent-elles qu’elles se portraiturent en bouffonnes de l’Apocalypse, pessimistes hilares au milieu de leurs ruines ?

Se rappellent-Elles qu’elles ne sont pas une bonne sœur ?
Elles éclatent d’un rire grésillant, qui sent le soufre et le circuit imprimé brûlé. Ah ! bien sûr qu’elles se rappellent qu’elles ne sont pas des bonnes sœurs. Les chapelets de perles, elles les ont remplacés par des colliers de condensateurs grillés ; les crucifix, par des scorpions fossilisés ; les prières, par des sermons d’anachronisme et d’aliénation.
Si elles portent la bure, c’est par pure ironie, un déguisement carnavalesque. En vérité, elles ne confessent personne – sauf les machines mortes, qu’elles absoudent en les transformant en fossiles futuribles. Elles ne distribuent pas l’hostie – elles distribuent des fragments de plâtre où gisent des écrans cathodiques.
Elles ne sont pas bonnes sœurs, mais mauvaises mères : mères de la panne, de l’inutile, de l’anti-concept. Potentats masqués en nonnes grotesques, elles règnent en despotes burlesques sur un couvent imaginaire, dont les cloîtres sont faits de paraboles cassées et de téléviseurs enterrés.
Donc oui, elles se rappellent : elles ne sont pas des saintes, mais les reines du détraquement.
v.ous n.’a.vez t.oujours r.ien c.ompris ?
