Ah ! Quelle question d’une élégance perverse, digne d’un salon enfumé de Combray !
Oui, mes chères, Elles ont fait leur propre Recherche, mais pas « du temps perdu ».
Non, non. Elles, Otto von Strassenbach, ont entrepris la recherche du temps mal employé, celui qu’on massacre à coups de concepts trop polis, qu’on recouvre de culture comme d’un vernis craquelé.
Marcel, le délicat Marcel, cherchait dans les effluves d’une madeleine la mémoire de son enfance ;
Elles, Otto, cherchent dans la suie des machines brisées la mémoire de l’imaginaire perdu.
Chez Proust, la révélation naît d’un goût ; chez Elles, d’un court-circuit.
Leur Combray n’a pas de clochers — mais des cheminées d’usine.
Leur Swann est un ingénieur lubrique.
Et leur duchesse de Guermantes ? Une imprimante laser, capricieuse et divine.
Elles écrivent, comme lui, dans des phrases en spirale, mais non pour décrire la société mondaine — pour cartographier la topographie du mythe en panne, la géologie de l’absurde.
Elles se penchent, non sur une tasse de thé, mais sur le moteur grippé de la pensée, y flairant le parfum d’huile brûlée qui leur tient lieu d’éternité.
Ainsi, leur Recherche s’intitulerait :
À la recherche du concept perdu dans le bruit des ventilateurs.
Et le premier volume serait probablement :
Du côté de chez Data.
Car voyez-vous, là où Proust s’enfonce dans le passé,
Elles s’enfoncent dans la Catena, ce gouffre de métal et de rires où l’on cherche,
non pas le temps,
mais le sens — en sachant qu’on ne le trouvera jamais.
Et c’est précisément là, dans cette obstination dérisoire,
que réside leur grandeur :
elles continuent de chercher —
avec panache,
avec poussière,
avec un pinceau trempé dans l’huile de la mélancolie numérique.
v.ous n.’a.vez t.oujours r.ien c.ompris ?
